L'accès de plus en plus aisé à Internet et le développement des technologies de l'information et de la communication ont permis à de nouvelles formes de jeux et à de nouveaux acteurs de faire leur apparition.
Yopougon Maroc, quartier populaire de la plus grande commune d’Abidjan, il est 10h, ce mercredi 3 janvier 2024, des jeunes attroupés autour d’un point de paris discutent des matchs de football du jour.
Smartphones en mains, ils se partagent les pronostics probables de gagner. L’un d’entre eux, Moustapha Mohamed, la trentaine révolue, est celui à vue d’œil, le plus expérimenté du groupe, donne des directives et recadre ses compères qui tentent de leur donner de fausses combinaisons basées sur les côtes des équipes du jour.
‘’Les matchs d’aujourd’hui sont très risqués. Je propose qu’on parie en deux phases. On fait deux coupons contraires de 5 matchs. On parie sur les deux. Au moins, nous sommes sûrs de pouvoir bénéficier ce jour’’, ordonne-il.
Dans la foulée, un autre parieur rétorque : ‘’ lorsque nous parions sur plusieurs matchs, il y a forcément une équipe qui tue le ticket. Je propose donc qu’on parie sans trop réfléchir ou de faire nos paris sur les matchs en direct’’, propose-t-il. Les discussions sont chaudes mais les parieurs vont s’accorder sur un type de pari.
Considérés comme un moyen de réussite, voire une voie à la richesse, les sites de paris sportifs sont visités par des millions de personnes, fonctionnaires, ouvriers, étudiants et chômeurs dont l’âge varie entre 19 et 40 ans à 70%.
Chaque parieur y va selon sa méthode malgré les risques encourus. Ibrahim Koné, 26 ans, salarié dans une entreprise de la place au Plateau, participe au quotidien à l’enrichissement des bookmakers, ces professionnels qui reçoivent les paris.
‘’ J’ai commencé les paris sportifs depuis 2012. Je dispose de trois comptes dont 1Xbet, 1Win et Betclic. Au début on pariait au cyber et on faisait le ticket sur des papiers. Maintenant avec une connexion et un smartphone, il n’y a plus de restrictions, des paris illimités. Je peux gagner 2 fois sur 7 paris en moyenne mais en général, c’est plus de perte’’, se lamente-t-il.
Ibrahim Koné fait partie des 60 % de parieurs qui gagnent rarement mais empruntent toujours de l’argent pour jouer. ‘’La seule raison qui me pousserait à arrêter serait de récupérer tout l’argent que j’ai misé’’, se résigne M. Koné, confiant.
Unibet, Betclic, Pmu, Winamax, Pokerstars, Vbet, Netbet, Parions sport, 1xbet, 1Win, sont des sites en ligne de paris sportifs utilisés qui génèrent un montant de 1 000 milliards de dollars par an, selon Eurosport.
Conscient de l’intérêt des jeunes aux paris sportifs, plusieurs sites de paris naissent de plus en plus, proposant des cotes de matchs alléchant aux parieurs. Blé Kouamé, manager de structure de paris sportifs, explique le fonctionnement de ces entreprises.
‘’Tous ces bookmakers gagnent de l’argent en acceptant les paris sur un match et en les évaluant d’une manière qui ne représente pas la vraie probabilité des résultats. Cela s’appelle la marge. Cette marge permet de gagner de l’argent grâce aux paris placés par les parieurs, peu importe le résultat’’, révèle M. Blé.
Selon lui, la plupart des entreprises de paris sportifs tirent leurs bénéfices sur les paris perdants qui sont supérieurs aux paris gagnants. ‘’Sur 20 combinaisons risquées, seulement 5 peuvent être gagnantes et les 15 autres perdantes. Sur chaque pari, l’entreprise perçoit au minimum une marge de 6%’’, indique-t-il.
Selon BFMTV, ‘’les développeurs de ces jeux versent un pourcentage des mises aux clubs et aux organisateurs. Ce qui a permis à certains clubs de football comme le Paris Saint-Germain (PSG) d’améliorer ses finances’’.
La prolifération des jeux de hasard illicites et clandestins a des conséquences fâcheuses sur l’économie ivoirienne qui perd d’importantes ressources en termes de taxes évaluées en dizaines de milliards de francs.
A cet égard, a indiqué le ministre en charge de l’économie, Adama Coulibaly lors de son passage devant le Sénat, le 17 mai 2023 à Yamoussoukro, il a été identifié, au niveau des paris sportifs, plus de cinq cents sites internet proposant des jeux en ligne accessibles depuis la Côte d'Ivoire sans autorisation.
Le chiffre d'affaires annuel réalisé par ces sites est estimé à six milliards de francs CFA, soit une perte fiscale de cent quatre-vingts millions (180 000 000) de francs CFA pour l'Etat.
Pour mieux contrôler ce secteur, l’Etat Ivoirien, à l’issue du Conseil des ministres du mercredi 06 décembre 2023, a accordé à la Loterie Nationale de Côte d’Ivoire (Lonaci), les droits exclusifs d’organisations et d’exploitations des jeux de paris sportifs sur le territoire ivoirien.
AE/hs/Top News Africa
Publié le vendredi 5 janvier 2024